Communiqué de presse
rapport public de la Cour des comptes sur l’Institut Lumière
La Cour des comptes vient de tenir, ce jeudi 18 mars 2021, sa traditionnelle conférence de presse autour de la remise de son rapport public annuel 2020. Elle a décidé que ce texte devait aussi se consacrer à la culture et c’est l’Institut Lumière qui a été choisi, avec un chapitre ayant pour titre : « une association culturelle à l’épreuve de la crise sanitaire. »
Désormais rendu public, le rapport est disponible ici.
Nous sommes heureux de vous le présenter, d’en résumer les grandes lignes et de l’accompagner de quelques commentaires.
La Cour des comptes note que, depuis dix ans, l’Institut Lumière s’est hissé au rang des institutions culturelles de premier plan, sur le territoire national comme à Lyon, et cela dans un contexte de baisse régulière de la part de ses subventions publiques au regard de son budget général. Ses baisses, l’Institut est parvenu à les compenser grâce à une augmentation de ses ressources propres : recettes des activités et soutien de partenaires privés.
De fait, la part de financement public dans le budget général de l’association ne s’élève plus aujourd’hui qu’à 40%, alors qu’il représente en moyenne 80% de celui de structures analogues, en région ou à Paris. Un rééquilibrage apparaît nécessaire.
Cependant, le déploiement important de l’ensemble de ses activités, pour diversifier son offre, poursuivre sa mission de valorisation et de diffusion du patrimoine cinématographique, continuer à former les spectateurs de demain et ainsi toucher un public plus large et plus nombreux font de l’Institut, écrit la Cour, un exemple d’institution contribuant à renforcer et dynamiser l’offre culturelle dans sa ville, sa métropole, sa Région et sur le plan national.
La Cour des comptes souligne le dynamisme singulier d’une association qui s’est développée sur un modèle efficace, souverain et très largement autofinancé, même si, et l’arrêt des activités en 2020 l’a mis en évidence, il demeure dépendant de ses bons résultats en matière de billetterie et de financements privés. De fait, l’Institut Lumière est d’une certaine façon pris au piège en n’étant guère récompensé par ses performances puisqu’il a été plus impacté par la crise sanitaire que d’autres institutions mieux subventionnées, moins dépendantes de leur succès.
Dans son rapport, qui a été remis au Président de la République, la Cour félicite également l’association pour la réussite de ses missions de médiation auprès du public, comme de sa politique éducative ; elle note que la structure accueille un nombre record d’élèves tout au long de l’année : ils sont en effet plus de 45.000 à participer aux activités scolaires.
Un certain volontarisme économique de l’équipe de l’Institut Lumière est mis en avant, comme les initiatives qu’il prend. L’institution a su en effet développer des activités nouvelles, par rapport à sa mission première, comme le sauvetage de salles de cinéma art et essai (la Fourmi et les CNP devenus les cinémas Lumière) ou la création de lieux culturels et commerciaux comme la librairie du Premier-Film, le café Lumière ou les deux galeries photos – aucune de ces initiatives n’a été financée par l’argent public, au-delà des aides automatiques, accordées aux salles de cinéma par la Région Auvergne-Rhône-Alpes et le Centre National du Cinéma et de l’image animée.
Le chapitre consacré à ses activités démontre le bienfondé de la création de sociétés commerciales visant à la diffusion et à la valorisation du patrimoine et de la création. Cela renforce la présence de la culture cinématographique dans la ville, sans que cela coûte davantage aux collectivités et aux contribuables. Mieux, et il est important de le préciser, ces activités ont créé et sauvé des emplois et se sont inscrites dans la même démarche culturelle et patrimoniales que les activités historiques traditionnelles de l’Institut Lumière. Ainsi, l’institution s’est transformée en moins d’une décennie, en se renforçant, en innovant et en préparant l’avenir.
Dans le même souci d’optimiser l’investissement public, le festival Lumière est organisé chaque année par l’équipe de l’Institut Lumière ce qui n’additionne pas une « couche » structurelle d’organisation, qui eut été forcément coûteuse. Dès son lancement en 2009, grâce à la Métropole de Lyon et à la Région Auvergne-Rhône-Alpes, le festival s’est imposé, et est désigné par la Cour comme une manifestation majeure de cinéma en France, la première de sa nature (le cinéma classique, le patrimoine du cinéma) et avec 200.000 spectateurs lors de sa dernière édition « normale » (en 2019) l’une des toutes premières par sa fréquentation publique.
Le festival Lumière est devenu d’emblée un événement de niveau mondial et l’attribution du Prix Lumière s’est transformée en un événement de même importance.
Il est noté que le festival, comme les activités nouvellement créées, est un fort relais de croissance, permettant de réunir les professionnels, le public, des bénévoles, des associations et des artistes. Aujourd’hui, le festival est autofinancé à 72%. Ce chiffre très exceptionnel est le symbole de la volonté et des convictions de l’Institut Lumière de ne pas faire un appel excessif au subventionnement public. Il reste néanmoins à l’Etat (Ministère de la Culture, CNC) de participer à son financement, comme il le fait pour des manifestations de même nature. Nous y réfléchissons ensemble.
L’Institut Lumière est, à travers la fréquentation du Hangar du Premier-Film, la première salle « mono-écran » de France et cela avec des « films de patrimoine » (et non des films contemporains dont la sortie fait l’objet d’une forte médiatisation), six jours de programmation et entre deux et trois séances par jour, soit beaucoup moins qu’une salle commerciale traditionnelle. Ce succès est avant tout dû à la fidélité du public de Lyon, du Grand Lyon et de la Région et spécialement des abonnés de l’Institut Lumière.
Tout en soulignant que l’Institut est l’une des cinémathèques mondiales les plus performantes en matière d’accueil de public et de modèle économique, la Cour précise cependant que le développement vertueux basé sur l’autofinancement et l’utilisation raisonnable de l’argent public est relativement fragile et, en particulier, est aujourd’hui bouleversé par la crise sanitaire financière.
Le rapport pointe alors que la part des subventions pourrait s’avérer trop faible pour assurer la trésorerie nécessaire et permettre à l’association de relever les défis auxquels elle aura à faire face. En effet, malgré les preuves apportées sur sa capacité d’attraction et malgré son rayonnement local comme international, l’Institut Lumière est l’une des institutions lyonnaises les moins financées par les pouvoirs publics.
Cette diminution de l’engagement public est donc assez globale, et est sans doute la rançon de son propre succès. On peut néanmoins s’étonner que l’Institut Lumière n’ait pas été mieux accompagné financièrement, comme d’autres institutions culturelles, alors qu’il multipliait les initiatives et les réussites. Par exemple, la participation de la Ville de Lyon classe l’Institut Lumière au 17e rang seulement des investissements culturels de la municipalité.
Une étude détaillée a par ailleurs établi que le coût en argent public d’un « spectateur Lumière » est l’un des moins coûteux pour une ville qui doit mieux accompagner l’institution installée sur le lieu de naissance du Cinématographe.
En exprimant ses remerciements à la Cour des comptes, l’Institut Lumière reçoit avec satisfaction ce rapport élogieux qui soutient ses orientations et ses convictions. L’équipe de l’Institut Lumière, comme toutes celles qui œuvrent pour la culture dans notre pays, se préoccupe des conséquences de la situation sanitaire dont l’issue est espérée au bout du printemps qui arrive. Elle abordera la future reprise avec hâte et détermination et prépare déjà la saison 2021-2022 dans un dialogue renforcé avec les collectivités publiques pour poursuivre, alors qu’elle célèbrera bientôt les 40 ans d’existence de l’institution, son travail et son engagement au service de l’histoire du cinéma et de ceux qui veulent chaque jour rappeler son importance dans nos vies.
C’est de cela dont il s’agit et Bertrand Tavernier, Président de l’association depuis sa création en 1982, n’aura jamais cessé de le répéter : « Une rue du Premier-Film, il n’y en a qu’une seule au monde. Pour une ville, pour le public, pour les artistes et les professionnels, cela oblige à quelques devoirs. »
Thierry Frémaux, directeur général
Cécile Bourgeat, secrétaire générale
et toute l’équipe de l’Institut Lumière